Constantin Kousnetzoff au musée Carnavalet

Il faut savoir qu'une école de peinture a existé en Russie jusqu'aux événements d'octobre 1917. Il faut savoir aussi que des peintres russes, avant comme après cette secousse de l'histoire, ont quitté pour diverses raisons leur pays natal, se sont installés en France et ont contribué à la formation de ce qu'on appelle « école de Paris ». Constantin Kousnetzoff est l'un d'eux.

Sa dette envers l'Impressionnisme est évidente, comme sa parenté spirituelle avec des maîtres plus anciens, poètes de l'espace et de la lumière, ainsi Claude Gellée et surtout Turner. Mais Kousnetzoff a su toujours rester lui-même, c'est-à-dire profondément russe, comme le révèle son interprétation subjective, lyrique, irrationnelle et parfois inquiétante de paysages qui nous sont pourtant familiers et dont les impressionnistes, avec les apparences de l'audace, s'attachaient en fait à traduire la réalité. La littérature et la musique russe, plus connues que la peinture du même pays, nous aident à comprendre ce qu'il y a d'originalité dans la vision ardente d'un Kousnetzoff.

Les paysages de ce peintre sont pour la plupart des paysages de Paris, et c'est bien pour cette raison qu'ils ont leur place au moins temporaire au musée Carnavalet. Cela ne veut pas dire que Kousnetzoff ait le moins du monde affiché des intentions d'ordre iconographique. Les sites parisiens qu'il a choisis, sans chercher d'ailleurs à s'éloigner beaucoup des plus traditionnels, qui jalonnent le cours de la Seine du pont d'Austerlitz au Trocadéro en passant par Notre-Dame et le pont des Arts, ont été pour lui des prétextes à l'évasion vers l'imaginaire. Le Paris de Kousnetzoff n'est pas un Paris représenté, mais un Paris rêvé.

Les toiles figurant à cette exposition ont été aimablement prêtées par des personnes qui ont préféré garder l'anonymat, mais à qui je tiens à exprimer ma reconnaissance. L'une de ces toiles, la Place de la Concorde, restera d'ailleurs à Carnavalet grâce à la générosité de la famille du peintre. Je voudrais enfin dire ma gratitude à Madame Monique Vivier-Branthomme, petite-fille de Kousnetzoff, qui a bien voulu mettre sa connaissance de la vie et de l'ouvre de son aïeul au service de l'exposition qui lui est consacrée - et de ce catalogue qui est pour l'essentiel le fruit de son travail.

BERNARD DE MONTGOLFIER


Conservateur en chef du Musée Carnavalet.


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Monique Vivier-Branthomme